La minute Com’ – Petits conseils à l’usage de mon pote « alter »

J’ai toujours aimé l’entre-deux. En soirée, tu me verras souvent à la fenêtre, mais tournée vers l’intérieur. Ou alors sur le pas de la porte de la cuisine (oui, c’est moi qui te bloque toujours l’accès à la contre-soirée, désolée). Sans doute parce que j’aime flotter entre deux ambiances, goûter à tout, sans prendre le risque de me retrouver enfermée ici ou là. Sans doute aussi parce que cet entre-deux me permet de garder la distance nécessaire pour observer, et essayer de comprendre. Les postures des uns et de autres, les dynamiques au sein des groupes…

Ce goût pour l’observation et l’analyse a trouvé son prolongement dans mes études de communication (cette petite précision pour apporter un minimum de crédibilité à ce que je vais raconter. On m’a appris comment faire passer un message, comment faire en sorte que la forme serve le fond). Quant au flottement, il se retrouve dans le fait que je fréquente aussi bien des costumes-trois-pièces aux souliers bien trop vernis que des pulls en poils-de-cul-de-chèvre.

Un champ d’observation large, donc. Mais c’est me formant aux massages de bien-être puis en plongeant dans la danse libre que j’ai eu le loisir d’observer de près cette tribu qui est un peu devenue la mienne, celle des « alter ». Je sors ici de la notion purement économique de l’alter mondialisme pour désigner, en gros, ceux qui comme toi et moi pensent qu’un autre monde est possible : dans le rapport à soi, aux autres, à la Terre sous nos pieds, aux cieux au-dessus de nos têtes.

Je t’aime bien, gars. Vraiment. Tu es plein de bonne volonté, tu portes en toi les graines du changement dont Demain a besoin et, contrairement à ceux qui ne font que blablater, tu te bouges, tu modifies la façon dont tu vis, dont tu consommes, parce que tu portes en toi l’esprit du colibri.

Le fond y est, donc. Mais franchement, je te l’assure, je te le jure, il faut que tu taffes la forme. Surtout là, depuis qu’on s’est pris le Virus sur le coin de la gueule et que le changement, c’est vraiment maintenant.

Laisse-moi t’expliquer.

Certes, on dit « L’habit ne fait pas le moine ». Mais ça c’est une maxime, un petit bout de sagesse qu’on doit tous essayer de garder dans un coin de nos têtes. Nos cerveaux, eux, ne sont pas ceux des grands sages, pas d’emblée en tout cas. Ils sont même parfois assez couillons. C’est-à-dire qu’ils doivent traiter un nombre phénoménal d’informations en permanence et que dans leur recherche d’efficacité, eh bien, ils catégorisent, très très vite. Autrement dit : ils mettent tout dans des cases.

Alors si toi tu veux juste être dans une case dans laquelle tu es bien au chaud, avec ses signes de reconnaissance propres (on appelle ça une communauté), très bien, je ferme ma grande gueule. Habille-toi comme tu veux, parle comme tu l’entends, et assainis tes aisselles quand ça te chante. Mais si ton but est d’apporter le changement, tu seras d’accord pour dire qu’il te faudra faire découvrir ta vision, ton univers, donner envie et, qui sait, convaincre. Ce qui ne sera pas possible si on te met dans la case « marginal perché », à moins que tu aies l’étoffe d’un Gandhi.

A partir de là, il faut que tu saches deux trois trucs. C’est peut-être injuste, mais c’est comme ça : porter un bonnet péruvien, c’est te tirer une balle dans le pied. Avoir des odeurs corporelles douteuses, c’est la garantie d’un social distancing efficace, certes, mais ça ne favorise pas l’échange rapproché dont tu auras besoin pour répandre la bonne parole une fois que le Virus aura clamsé. Agiter les mains comme dans « Ainsi font font font les petites marionnettes » au lieu d’applaudir à la fin d’une session de danse te donne juste l’air d’un gogol. Sérieusement, d’où tu sors ça ? D’une retraite vipassana ? Très bien, ça, la retraite vipassana. Mais oh hé, t’es revenu dans la vraie vie là, et encourager, féliciter, remercier, ça passe très bien en produisant un son à l’aide de ses deux mains, demande au personnel soignant à 20h05, il te le confirmera.

Réfléchis. Réfléchis à l’effet que tu produis en disant « gratitude » à quelqu’un au lieu de lui dire, tout simplement, « merci ». La SIM-PLI-CI-TÉ mec. Celle qui fait que tu n’as pas non plus besoin de dire « je me connecte au moi qui a envie de se connecter à toi ». Connecte-toi à ce que tu veux, à n’importe lequel de tes « moi », mais ferme-là, ça sera mieux si tu veux qu’il reste quelqu’un face à toi à qui te connecter. Si tu as des doutes, c’est pas compliqué, réfère-toi aux Grands du changement, ceux que tout le monde écoute. Est-ce qu’il parle chelou, Rabhi ? Non. Est-ce qu’il parle chelou, Ricard ? Non plus. (Attention attention, Ricard est habillé chelou parce qu’il est moine bouddhiste, ne vas PAS essayer de faire pareil !).

L’autre jour, je me disais que les putains de coffee-shop bobos avaient plus fait pour la cause vegan que toi et tes bonnets péruviens. Attention, les coffee-shop et leurs putains de lattè avec des formes de cœur sont loin d’être ma tasse de thé. Non pas que j’aie quoi que ce soit contre les cœurs. Simplement, quand tout le monde se met à instagrammer des lattè avec des cœurs dessus, ça me donne envie de gerber. Un monde de clones, tout lisse.

Toi ta chance c’est que tu as des aspérités. Utilise-les comme il faut. Mets-les en valeur intelligemment. Sers la cause au lieu de la desservir.

A moins que ça te fasse tripper qu’on te range dans la même case que lui :

Allez, sans rancune l’ami, on se retrouve Demain…

PS : l’ami était un mec aujourd’hui mais ç’eût pu être une nana. J’ai juste vraiment eu la flemme pour l’inclusif.

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