Ta sortie du samedi: Ambivalences de Justine Darmon

JustineDarmon#Projet Ambivalences#LégendeErosetPsyche#Photo 3sur9(1)

Tu entres et tu regardes, comme par le trou d’une serrure. Un homme, seul, une femme, seule, et puis des couples. Tu avances, au pas, non pas parce qu’il y a devant toi un touriste qui se prend en selfie devant la Joconde mais parce que ces corps nus t’hypnotisent. Tu pourrais rester devant chacun d’entre eux pendant des heures, te perdre dans la courbe de cette épaule, dans le demi-jour de cette chambre noire. Tu pourrais les regarder pendant des heures oui, comme on regarde l’être aimé, tu sais.

Tu as chaud, puis tu as froid, tu as le coeur qui bat. Et puis tu apprends leurs noms. Il y a là Perséphone, Pan, Hermaphrodite et Salmacis, Médée, Orphée, Atlas, Hadès, Ariane, Eros et Psyché. Beautés masquées, beautés yeux bandés, beautés divines. Mais ils sont terriblement humains, les dieux de l’Olympe. Une hanche parfaite devient anguleuse là, une peau lisse et ferme ici soudain craquèle. A la perfection d’un buste antique succède une paire de seins divergents, grandeur céleste et fragilité terrestre.

Tes tripes palpitent devant la force de la vie comme devant celle de l’art. Ils semblent si seuls, les sujets de Justine… Solitude voulue, corps déployé, solitude subie, position foetale. Mais seuls.

Les larmes sur une rive, l’orgasme de l’autre, Justine te laisse forcément au bord de l’un ou de l’autre. Tout change lorsque ses sujets rencontrent leur double platonicien. Force et fureur de l’amour et puis douceur de l’abandon. C’est ça. C’est ce après quoi on court tous, intensité et relâchement. Etre aimé, enveloppé. Ne faire plus qu’un, en être plus fort. Complets, enfin, ne serait-ce que l’espace d’un cliché.

Courez-y, ça se passe jusqu’à demain samedi 27 octobre de 15h à 18h à la Galerie Rouen, 3 rue Pérée, dans le 3e.

Révélations

Je l’ai su dès que j’ai vu ses photographies, alors que je ne la connaissais pas encore vraiment : Justine aime voyager. Avec la série de portraits en noir et blanc de sa prochaine expo Music’Spirits, c’est un voyage vers un lieu d’ordinaire inaccessible aux profanes qu’elle nous propose: celui où les musiciens offrent leur âme aux Dieux de la musique.

Les paupières closes, nimbés des mêmes vapeurs que celles qui accompagnent les créatures célestes, ils sont « ailleurs ». Concentrés à l’extrême, méditatifs, ils communient. Leurs yeux ouverts sont levés au ciel, attendant la révélation, ou plongent dans les vôtres, présents et absents tout à la fois.

C’est cet instant précis que Justine a la talent si particulier de savoir saisir : cet instant où la foule entre en transe, où les musiciens, extatiques, possédés corps et âme, ne sont plus eux-mêmes que les instruments d’Apollon et de Sarasvati, humbles intermédiaires entre la Musique et son public. Un moment hors du temps…

Si comme moi vous aimez les échappées vers d’autres horizons spatio-temporels, allez faire un tour à la Galerie Rouan (3 rue Pérée 75003 Paris) du 12 au 22 octobre. C’est un voyage qui en vaut le détour, je vous le promets.