La faute à qui?

wonderwomanEn France, dès l’âge de 15 ans, les filles passent 44 minutes de plus que les garçons à faire le ménage. Voilà le genre de nouvelle qui m’enchante au plus haut point. C’est incroyablement réjouissant non ?

Sérieusement, ça me rend dingue.

Et puis je compulse quelques dossiers, et les chiffres surgissent. C’est insupportable mais il y a pire. Ce qui ne veut dire qu’on doit fermer sa gueule. Juste essayer de réfléchir de façon globale. Think global, act local, vous connaissez la chanson.

500 000 avortements sélectifs chaque année en Inde pour éviter la naissance d’une fille et un sex ratio de 120 garçons pour 100 filles en Chine (le ratio « normal » étant de 105 pour 100).

La faute à qui ?

5000 femmes victimes de crimes d’honneur chaque année dans le monde.

La faute à qui ?

130 millions de femmes excisées puis « cousues » pour assurer leur virginité dans le monde.

La faute à qui ?

Plus de 130 millions de femmes concernées par le mariage forcé dans le monde.

La faute à qui ?

La faute à la société, bien sûr.

La faute aux hommes, qui ont dominé les femmes depuis que le monde est monde.

Parce qu’ils ont la force physique pour eux, semble-t-il

Parce que, pour s’assurer que leur descendance soit VRAIMENT leur descendance il leur a fallu nous enfermer. Ces chiennes lubriques sont insatiables, voilà qui n’est tout de même pas très rassurant.

Parce qu’esclaves de leur désir, des millions d’entre eux voient en nous leur plus grande faiblesse, et nous haïssent pour cela. Enfermons-les, ces créatures du diable, ces infâmes tentatrices qui de géants font de nous des nains. Sans quoi elles nous voleront tout. Notre cœur, notre âme, notre force.

Nous voilà donc enfermées, depuis une éternité. Dans des harems et des bordels. Derrière des voiles et des fourneaux. Je suis sûre qu’y en a au moins une dans le tas qui s’est fait ligoter façon bondage avec un fil d’aspirateur, la belle image…

La faute aux hommes, donc.

Seulement voilà, il y a comme un petit problème.

Qui est-ce qui sollicite davantage les filles que les garçons pour les tâches ménagères, qui est-ce qui montre le bel exemple de la bonne à tout faire à demeure ?

Les mères.

Qui les femmes enceintes d’un bébé de sexe féminin craignent-elles le plus en Inde ?

Leur belle-mère.

Qui pratique les excisions en Afrique ?

Les femmes.

La faute à qui, AUSSI, alors?

Tout se passe comme si nous faisions de notre mieux pour maintenir en place ce même système qui nous oppresse. Ce bon vieux truc de la victime qui devient bourreau, il marche à tous les coups décidément.

Mais il n’y a pas que ça.

Il y a la peur.

En 2013, fuyant le village de son époux (mariage arrangé, cela va de soi), une jeune pakistanaise de 22 ans retourne dans sa ville d’origine, Karachi, avec l’aide d’une tante et d’une cousine. Là, elle rencontre une autre homme, la petite perverse. Le conseil tribal de l’époux bafoué la fait donc fait exécuter, ce qui est bien normal. Sans oublier sa tante et sa cousine hein, faut pas déconner, quand même. Et bien entendu, ce sont des membres de leur propre famille qui s’en sont chargés. Le linge sale, ça se lave en famille comme chacun sait.

En Inde une femme qui a le malheur de ne donner naissance qu’à des filles peut être renvoyée chez ses parents sans ménagements. Elle perd alors tout statut et est traitée comme une moins que rien durant le restant de ses jours. Son mari la remplace rapidement par une nouvelle épouse dans l’espoir que celle-ci lui ponde enfin un descendant de sexe mâle…

En Afrique, une femme qui s’élève contre l’excision rejette la tradition et s’expose ainsi à être mal vue par les siens, et à son tour rejetée…

En France, reconnaissons le chance que nous avons de ne pas avoir à nous battre contre ce genre d’horreurs. Sans oublier que nous avons nos propres combats. Partage des tâches, égalité salariale, parité, violences sexuelles, violences conjugales, sexisme, stéréotypes, la liste est longue.

Bouclons la boucle avec nos histoires d’aspirateurs et de serpillères. Pourquoi chez nous les femmes continuent-elles à assurer 80% du travail domestique ? Parce qu’elles sont masos ? Parce qu’elles redoutent que Loulou finisse par en avoir marre de s’entendre demander de faire la vaisselle et les quitte pour une autre, qui elle fera pas chier avec la vaisselle, la poubelle et les chaussettes qui traînent? Parce qu’elles culpabilisent quand elles s’occupent d’elles et non des autres, comme le veut l’image de la Mère avec un M majuscucle, de la Femme avec un grand F ? Parce que finalement faire 80% du taf c’est avoir le pouvoir quelque part, régner sur un petit royaume, aussi plat, aussi petit, aussi limité soit-il? Et que perdre son royaume, c’est tout perdre ?

Je ne sais pas.

Ce dont je suis certaine, en revanche, c’est que la peur, cette vicieuse, a laissé sa trace visqueuse et puante dans le cœur de toutes ces femmes dont je viens de vous parler. C’est elle notre véritable ennemi, le principal obstacle à notre liberté.

Mais comme dirait l’autre, le courage c’est d’y aller même – et justement – quand on a peur. Ce n’est qu’à ce prix que les choses bougeront.

Il faut s’indigner. Dénoncer. S’unir. S’épauler. Chercher de l’aide quand on en a besoin. Aider quand on le peut. Se battre.

Parce qu’on est victime que tant qu’on décide de le rester.

Parce que la liberté et l’égalité sont rarement servies sur un plateau d’argent.

La liberté et l’égalité se conquièrent

La peur au ventre toujours.

C’est qu’on les paie parfois au prix fort, ces droits fondamentaux là. Au prix de la vie pour certaines,  de l’amour pour d’autres, de la sécurité pour d’autres encore.

Mais je vous l’assure, la liberté et l’égalité finissent par se conquérir.

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